La pandémie de la COVID-19 : un ralentissement nécessaire?
En 2017, après 11 mois à vivre sur notre voilier, nous sommes revenus dans notre maison, sur la terre ferme. On savait que le retour serait difficile. Tous les voyageurs le disent. La réadaptation nécessite en
moyenne la même durée que le voyage.
Bref, on n’était pas surpris de notre mal de vivre, comme si
la vie n’avait plus aucun sens. Mais au-delà de ce mal de vivre, le plus
difficile était d’être totalement déconnectée de la société… et de ne pas avoir
tant envie de s’y reconnecter.
Allumer la télévision était impensable. Malgré tout, j’ai
repris ma bonne vieille habitude de lire La Presse à mon réveil. Et le mal de
vivre de l’ensemble de la planète m’a semblé bien plus grand que le mien. Et
l’angoisse s’est emparée de moi.
Alors que je dormais dorénavant dans un lit stable, dans une
maison qui l’était tout autant, que je n’avais plus à me soucier de la météo et
des vents, ni à me questionner à savoir où l’on allait le lendemain, je me suis
mise à me réveiller en pleine crise d’angoisse durant la nuit. Étrange, cette sensation de malaise, sans raison, sans aucune explication logique. Et elle se répétait nuit
après nuit. J’en suis venue à la conclusion que je ressentais l’angoisse de la
société tout entière, que la pression exercée dans notre monde m’étouffait. Pourtant,
Eric et moi faisions des choix comme nous les avions toujours faits… pour avoir
une vie en toute simplicité, pour être là pour nos 4 filles, avoir le temps de
manger et de discuter en famille tous les jours. Pour ne pas avoir besoin de
courir sans cesse, pour tenter malgré tout d’avoir un rythme de vie
relativement lent, malgré le tourbillon de la vie. Mais évidemment, on n’y
échappait pas et on se faisait happer de plein fouet par la réalité.
Tranquillement, on s’est réhabitué à cette nouvelle vitesse
de croisière… 100 fois plus rapide que sur Perla. Le karaté, l’entrainement et
surtout le yoga ont contribué à diminuer mon angoisse qui s’est dissipée à travers le temps. Malgré tout, elle demeure là et ressurgit dans mes nuits par
moment, assez régulièrement. Je me suis en quelque sorte habituée à sa
présence.
Mais étrangement, depuis une semaine, je ne la ressens plus,
plus du tout! La planète en entier a cessé d’angoisser… Pourtant, l’angoisse
peut être tout autre actuellement, et elle s’immisce sournoisement chez
plusieurs personnes. Mais la pression folle associée à la vitesse a cessé
subitement. On tourne en rond, mais on n’a pas le choix de finir par se lever
la tête, de saluer son voisin, de voir le ciel et tout ce qui nous entoure. On
réalise que la vie est incroyable, que chaque petit instant est précieux, que
l’on est chanceux de s’avoir les uns les autres. Que ferions-nous sans notre
famille, nos amis, nos voisins? Vous savez, lorsqu’il ne reste plus rien… il reste… l’amour.
Un retour sur la terre ferme, une prise de conscience
À notre retour, pas une journée ne passait sans que je me dise
qu’il faudrait que tout le monde vive sur un bateau plus ou moins longtemps.
Sur l’eau, on voit la vie lentement à travers une autre
lentille. D’abord, on comprend vite que l’on est tous égaux, peu importe la
grosseur de notre bateau. La mer nous ramène vite sur le même palier, la menace des ouragans, tout autant. Les spectacles quotidiens, les merveilles
sous-marines s’offrent à nous, peu importe notre position dans la société. La
nature n’a pas de préférence, elle est là, tout simplement, pour tous ceux qui
osent lever le regard, et elle est là, tout le temps.
Parfois, elle se déchaine
et laisse de tristes paysages derrière elle, brouille l’eau et ses coraux, mais
si l’on est patient, elle s’offrira à nous à nouveau sous son plus beau jour.
Sur l’eau, on réalise vite qu’être avec ses enfants 24
heures sur 24, c’est merveilleux! On les connait réellement et on réalise
qu’ils apprennent tous différemment. Ce n’est pas toujours facile, parfois plus
difficile avec certains, mais c’est extraordinaire de trouver la clé pour les
aider à apprendre… d’autant plus que ce sont souvent eux qui en ont beaucoup à
nous apprendre.
On constate qu’après la pluie, vient vraiment le beau temps…
mais qu’il faut se méfier du calme… car, oui, l’expression le calme avant la
tempête n’existe pas sans raison… et qu’il faut avoir confiance en son
équipage, soit ses enfants et son partenaire de vie. Car on prend des bonnes
décisions, mais parfois aussi des mauvaises, mais on est tous dans le même
bateau… et on doit assumer ses décisions et affronter les conséquences. Malgré les moments difficiles, il est fascinant de voir la mobilisation de tous dans
ces situations.
Et malgré les hauts et les bas de la vie, on ne peut pas
déprimer très longtemps, car lorsqu’on regarde tout autour, on prend conscience du
privilège que l’on a de vivre sur une telle planète. La beauté se trouve
partout, mais parfois on ne la voit pas du premier coup d’œil. Si l’on passe
trop vite, on manque tout du spectacle. On apprend aussi qu’avec la patience,
l’impossible devient possible, par exemple nager avec des dauphins en liberté, ou encore avec des tortues, avoir un spectacle de feux d'artifice unique en son genre... ou encore terminer sa quatrième année avec une langouste comme trophée.
On prend conscience que les gens qui nous entourent ont tous
quelque chose à nous apprendre, tous sans exception. Chaque rencontre nous fait
évoluer. Les jugements n’ont plus leur place. Et l’on réalise que l’humain est
extraordinaire… et que l’on n’a tellement pas besoin de vivre dans une
« boite », que les chemins possibles sont nombreux, certains semés
d’embûches, d’autres plus faciles, mais que rien ne nous empêche réellement
d’aller où l’on veut. Seulement, nous devons respecter la nature et ses
éléments. Ils sont nos plus grands guides. Pourtant, sur terre, la nature
disparait de plus en plus derrière des maisons toujours plus grandes, des
bâtisses toujours plus hautes, la pollution sous toutes ses facettes…
Et voilà que notre société au grand complet vit en
confinement, un peu comme dans un bateau. Je souhaite de tout cœur que la
situation se résorbe rapidement, que ce virus ne fasse pas trop de dommages,
que l’on réussisse à le dompter, qu’on trouve un remède… mais j’espère de tout
cœur que l’on se souviendra… que l’on se souviendra que c’est bien de prendre
son temps, que les enfants peuvent apprendre de mille et une façons, qu’on n’a
pas besoin de consommer à outrance, que la nature est merveilleuse et toujours
présente pour nous. Bref, j’espère que ce ralentissement planétaire aura
davantage de positif que de négatif pour chacun d'entre nous.
Ça va bien aller! |
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