Nous sommes une famille de 6 qui avons eu le bonheur de vivre sur notre voilier Perla VII durant près d'un an

Mai : le mois de Marie, mais aussi celui de Rémy

C’est le mois de Marie, c’est le mois le plus beau… Pour avoir passé tous les dimanches de mon enfance à l’église, j’ai des paroles et des chansons gravées au plus profond de moi. Alors durant tout le mois de mai, cette chanson résonne dans ma tête. Le mois de mai, c’est le mois de Marie.... Mais cette année, la phrase s’est transformée : C’est le mois de Marie, mais c’est aussi le mois de Rémy.

Il y a déjà plus d’un an, le 4 mai 2015, j’allais reconduire Florane à son cours de danse. Un merveilleux lundi matin sous un chaud soleil. Comme à l’habitude, mon regard s’est dirigé vers le splendide Bassin de Chambly. Une huile. Le calme plat. L’eau était invitante. En début de soirée, je revenais au même endroit  pour le cours d'Alixia. Le vent s'était levé, le paysage s'était transformé. Comme par ces chaudes journées où l’eau nous montre ses deux extrêmes. J’ai réfléchi au côté fascinant et traître de cette eau qui nous invite et qui nous repousse aussitôt. Il faut savoir la respecter. Elle est plus forte que tout.

Je me suis dit que je la préférais calme, mais qu’elle était toujours aussi belle. Je ne me doutais pas qu’au même moment, il s’y passait un drame.

Le lendemain j’ai appris que, pendant que je balayais des yeux le Bassin de Chambly, un jeune homme et son amie luttaient pour leur vie. Rémy Nolet et son amie Catherine avaient traversé le bassin en canot pour aller manger une pizza. Ils étaient partis sur une eau calme et se sont fait surprendre par le vent et les vagues. Ils ne portaient pas de vêtement de flottaison. Il faisait tellement beau et chaud. Lorsqu’une vague a chaviré leur canot, un seul gilet de sauvetage a été accessible. En ce début de mai, l’eau était glaciale. Comment réussir à nager à travers ces vagues lorsque notre corps est frigorifié? L’unique gilet ne permettait pas aux deux jeunes adultes de se laisser flotter. Rémy a dit à son amie de prendre le gilet, qu’il se débrouillerait. Il savait probablement de quelle façon l’histoire se terminerait. Catherine a été secourue sur l’une des berges. Lui est demeuré introuvable durant deux semaines.

Lorsque j’ai entendu parler de cette histoire, j’ai tout de suite pensé à Jack du Titanic et à l’une des répliques du film : « à ce qui compte! » Mais cette fois-ci, il n’était pas question d’un film, mais de la triste réalité… Alors, pourquoi être déchirée entre l’infinie tristesse de ce drame et cette phrase plutôt optimiste? Parce qu’il existe encore des êtres humains qui se soucient profondément de l’autre. Parce qu’il faut vivre notre vie à fond, sans pour autant lésiner sur la sécurité. Parce qu’il faut aussi se rappeler qu’un gilet de sauvetage est souvent inconfortable, mais qu’il sauve des vies. Il faut se souvenir de ce jeune homme, Rémy, qui a fait un geste héroïque pour sauver son amie, sans être certain qu’elle s’en sortirait. Il a accepté de se laisser aller pour qu’elle puisse rester.

Couché de soleil sur le Bassin de Chambly
Alors oui, à ce qui compte! Il faut profiter pleinement de chaque journée, partir sur un voilier, ou faire ce dont on a vraiment envie… même si la noyade est effrayante, même si la vie tout court peut parfois être effrayante.

La noyade, j’y ai pensé souvent, surtout lorsque nous naviguions avec des petites filles de 1 an et de 2 ans… J’y pense encore, bien sûr.


Lorsque nous sommes sur le bord du Bassin, je pense à ce jeune homme, que je ne connais pas et je prie pour sa famille que je ne connais pas. On l’appelle le héros du Bassin. J’espère que ce héros rappelle chaque jour à plusieurs jeunes et moins jeunes l’importance de porter un gilet de sauvetage, même s’il fait beau, même si l’on sait bien nager… Pour ma part, il est omniprésent dans mes pensées lorsque nous sommes sur l’eau. Mes filles ont toujours leur gilet lorsque nous naviguons, mais nous aussi, nous devons le porter. Rémy a agi avec bravoure en laissant le seul gilet à son amie, mais il aurait sûrement préféré en avoir un également pour lui. Alors à sa mémoire, je porte le mien et je vis pour ce qui compte vraiment!


Cynthia

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